Témoignage Entreprise

Un jeune homme handicapé mental devient salarié et sociétaire de l’entreprise Delta Meca

Grâce à un accompagnement sur mesure, Anthony a été embauché en CDI dans l’entreprise de mécanique industrielle nantaise, passée depuis sous statut coopératif. Comme tous ses collègues, il en est aujourd’hui sociétaire.


L'expérience

Fiche rédigée le 13/02/17

Le capital humain au cœur du projet d’entreprise

En matière d’innovation sociale, l’entreprise Delta Meca compte assurément parmi les pionniers. En juin 2015, cette PME de 40 salariés, spécialisée dans l’usinage de pièces mécaniques, devenait la toute première Scop d’amorçage* de France. En adoptant ce statut, nouvellement inscrit dans la loi, elle a donné à ses salariés la possibilité de s’associer progressivement à son capital pendant un maximum de 7 ans, tout en devenant majoritaires en voix dès le démarrage de la coopérative.
Cette orientation s’inscrit dans une vision de l’entreprise et du management que les co-fondateurs de Delta Meca, Christian Caille et Mireille Bréhéret, ont voulu « humaniste » dès sa création, en 2008, convaincus que la première richesse de l’entreprise est son capital humain.
Tous les salariés de Delta Meca sont donc en voie de devenir « propriétaires » de leur entreprise, et ce, quelle que soit leur situation. C’est également le cas d’Anthony, entré dans la société en 2012. Handicapé mental, le jeune homme avait été initialement orienté vers le secteur protégé, mais un accompagnement sur mesure, assuré par une structure spécialisée, lui a permis de devenir salarié en milieu ordinaire de travail et sociétaire d’une Scop…
« Nous avions un poste à pourvoir qui ne nécessitait pas un niveau technique très élevé et avions décidé de l’ouvrir à une personne en insertion, se souvient Mireille Bréhéret. Nous ne nous attendions pas du tout à recevoir une personne présentant un handicap mental, mais après avoir rencontré Anthony, nous avons décidé de tenter l’expérience avec lui. »

Une intégration progressive

L’Esat Hors lesMurs/Passerelle pour l’emploi, qui propose la candidature du jeune homme, n’est pas un Esat ordinaire : il ne possède pas d’atelier et ne vend aucune prestation. Sa spécialité est la mise à disposition auprès d’entreprises et l’accompagnement dans l’emploi de personnes présentant un handicap mental ou psychique.
L’intégration d’Anthony chez Delta Meca se déroule en trois étapes : une mise en situation professionnelle d’un mois permet une découverte mutuelle entre le jeune homme et l’entreprise. « Cela a été l’occasion pour nous de redéfinir le poste que nous proposions au départ et de commencer à tester Anthony sur différentes tâches », précise Mireille Bréhéret. Positionné comme agent polyvalent, le jeune homme intervient sur le conditionnement et l’expédition de pièces. Puis, à la faveur de son premier contrat de travail – un contrat d’insertion CUI-CAE –, sa « fiche de poste » s’enrichit au fur et à mesure de ses apprentissages : révision de matériel, petites opérations d’ajustage sur des pièces…
À 34 ans, Anthony n’a aucune qualification professionnelle et apprend au jour le jour, au contact de son tuteur. « Nous accueillons beaucoup d’apprentis et avons cette culture de l’accompagnement et de la transmission. Dans le cas d’Anthony, nous faisons preuve d’une plus grande vigilance car il a besoin d’être supervisé étroitement et de se voir rappeler régulièrement les priorités. »

Une énergie positive

L’accompagnement de l’Esat consiste, au départ, en des échanges réguliers avec un référent qui suit Anthony à titre individuel, répond aux questions de son tuteur et définit avec lui des objectifs d’évolution dans les tâches du jeune homme. Au fur et à mesure de son intégration dans l’équipe, ces échanges s’espacent, mais le référent peut être sollicité à tout moment en cas de besoin. Moins d’un an après son arrivée, Anthony signe son CDI.
« Nous avons certes veillé à lui offrir les meilleures conditions pour trouver sa place, précise Mireille Bréhéret. En retour, nous lui avons demandé de répondre – selon ses capacités, évidemment - aux exigences de l’entreprise qui attend de tous implication, responsabilité et autonomie. »
Quand Delta Meca se transforme en Scop, une difficulté se pose : Anthony étant sous curatelle, il ne peut légalement s’engager seul dans le capital d’une entreprise. À force d’arguments, son employeur obtient toutefois l’accord de l’association qui gère ses biens. « La règle d’une coopérative, c’est une personne = une voix. Il était indispensable que cela s’applique aussi à lui. S’il n’a pas, directement, le droit de vote en assemblée générale, il n’hésite pas à donner son avis. Cela décomplexe tout le monde. »
Avec le temps, Anthony a gagné en assurance, en autonomie. Il assure aujourd’hui des tâches un peu plus techniques, a passé son permis de conduire. Au-delà de son travail, il apporte à l’équipe, selon son employeur, un enthousiasme et une énergie très positive.

* Scop : sociétés coopératives et participatives. Le statut de Scop d’amorçage a été instituée par la loi sur l'économie sociale et solidaire du 31 juillet 2014 pour favoriser la reprise d’une entreprise par ses salariés.

Le témoignage

Mireille Bréhéret, directrice général déléguée de Delta Meca

« Nous faisons preuve de souplesse et Anthony doit aussi répondre aux exigences de l’entreprise »

« Le poste que nous proposions initialement était un poste de magasinier. Au fur et à mesure que nous avons fait la connaissance d’Anthony et mesuré ses capacités, nous avons décidé de nous organiser différemment. L’entreprise n’y perd rien et Anthony y a gagné un poste polyvalent, à sa mesure, dont il est très fier. Nous faisons preuve de souplesse à l’égard d’Anthony. Il doit répondre, comme tout salarié, aux exigences de l’entreprise. C’est ce qui le fait progresser. »

La fiche d'identité de l'entreprise

  • Entreprise : Delta Meca
  • Activité : Industrie mécanique
  • Région : Centre Val-de-Loire
  • Effectif : 40
  • Effectifs TH : 3
  • Contact : Mireille Bréhéret, DG déléguée

La fiche technique

  • Nombre de personnes handicapées concernées : 1
  • Type de handicap : déficience intellectuelle
  • Aménagements
    - techniques : non
    - organisationnel : oui
    - formation : non
  • Financement : Delta Meca, Agefiph, financements de droit commun
  • Partenaires : Esat hors-les-murs/Passerelle pour l’emploi
Thématique
Publié le 24 avril 2017