Témoignage Entreprise

Logidis Comptoirs Moderne se mobilise pour lever les freins à l’embauche d’un manutentionnaire sourd et muet

Malgré sa motivation et son engagement, Jean-Yves n’a pas convaincu les responsables opérationnels pendant sa mission d’intérim. Mais la direction et le RRH ont fini par trouver les arguments pour intégrer le quinquagénaire dans l’entreprise.

L'expérience

Article rédigé le 25/02/12

Une promesse d’embauche après une occasion manquée

Centre d’approvisionnement intégré du groupe Carrefour, le groupe Logidis Comptoirs Modernes (LCM) emploie plus de 6 000 salariés sur 13 sites en France. En 2010, il a signé un deuxième accord d’entreprise sur l’emploi des personnes handicapées.
Sur la plateforme de Moncel-lès-Lunéville, près de Nancy, comme sur tous les sites LCM, une cellule Handi Action s’est constituée autour du directeur et du RRH, Yvon Guénaire. L’établissement lorrain, qui a la particularité de recevoir et de distribuer tous les types de produits destinés aux magasins de proximité (fruits, légumes, surgelés, brasserie…) s’est fixé pour objectif de développer l’emploi et le maintien dans l’emploi en s’appuyant sur un réseau de partenaires locaux déjà bien identifiés (Pôle emploi, Cap emploi, le CREPI Lorraine*…) et en faisant connaître le plus largement possible son souhait d’intégrer des collaborateurs handicapés.
C’est cette ouverture affichée au handicap qui conduit Jean-Yves*, un demandeur d’emploi sourd et muet, a répondre à un appel à candidatures pour une session de formation collective en alternance destinée à des préparateurs de commande.
Pour Yvon Guénaire, le quinquagénaire a le profil, l’expérience et la motivation. Mais du fait de son handicap, la formation ne lui est pas accessible. Le RRH lui garantit qu’il lui proposera un poste à la première occasion.

Une période d’intérim qui suscite le débat

En septembre 2011, une opportunité se présente sur un poste de contrôleur réception. Yvon Guénaire propose à Jean-Yves une mission d’intérim de cinq mois. « Nous passons presque toujours par l’intérim lorsque nous recrutons, précise le RRH. J’avais face à moi un bon candidat, il fallait saisir l’occasion. »
Pour faciliter la communication, une sensibilisation au langage des signes est assurée par l’Unapeda à l’ensemble des salariés du service et des affiches sont apposées dans tous les lieux communs de l’entreprise. Cette première période d’embauche se déroule sans véritable difficulté aux yeux du RRH. Mais à l’heure du bilan, les responsables opérationnels se déclarent plus sceptiques. Selon eux, Jean-Yves serait trop lent. « Le handicap n’est pas leur principale préoccupation : ils sont fixés sur leurs objectifs et la rentabilité », constate Yvon Guénaire, tout en reconnaissant que le recrutement aurait peut-être pu être mieux préparé et mieux accompagné
Convaincu de l’engagement de l’intérimaire, le RRH est déterminé à renouveler l’expérience. Le directeur du site lui donne raison. « Nous nous sommes dit qu’il fallait réfléchir davantage sur le poste de Jean-Yves. »

Un contrat aidé pour lever les objections

Une deuxième opportunité se présente bientôt à l’expédition par la voix d’une responsable d’entrepôt. Yvon Guénaire, qui est alors secondé par un stagiaire RH, confie à ce dernier l’étude détaillée du poste proposé. Elle est réalisée en lien avec Jean-Yves avec l’aide d’un interprète en langue des signes. Cette étude permet d’organiser le poste en fonction des besoins du salarié, en tenant compte notamment des impératifs de sécurité. Il portera par exemple en permanence un gilet fluorescent.
Le RRH prend également conseil auprès de ses partenaires habituels que sont le Crepi et Cap emploi. Ils lui proposent de recourir au Contrat initiative-emploi (CUI-CIE) qui ouvre droit à des aides financières. L’argument avancé par les responsables opérationnels s’en trouve désamorcé. Le RRH prend par ailleurs le temps de leur expliquer le cadre de l’accord LCM, l’enjeu de l’emploi des personnes handicapées et la réflexion approfondie menée autour du poste, notamment en termes de sécurité. Un programme de formation à la LSF est par ailleurs mis en place en lien avec l’Urapeda.

L’entreprise continue à se mobiliser autour du handicap

Cette mobilisation a fini par permettre à Jean-Yves de réintégrer tout récemment l’entreprise comme contrôleur d’expédition. L’objectif d’Yvon Guénaire est désormais de pérenniser son emploi et de poursuivre la sensibilisation des équipes. « Cette démarche est engagée depuis longtemps avec le Crepi et Cap emploi, à travers des rencontres, mais aussi des visites de l’entreprise proposées à des demandeurs d’emploi handicapés. Il est important de nous constituer un vivier de candidats. » Deux visites de groupes ont ainsi été organisées en janvier et février 2012, l’opération devant être renouvelée régulièrement en cours d’années.
Parallèlement, grâce à la mise en place d’une cellule de maintien dans l’emploi dans l’établissement, et d’un référent Handiaction, salarié de l’entreprise, prévu dans le cadre de l’accord, différents aménagements de postes et reclassements sont en cours.
Enfin, les échanges autour du cas de Jean-Yves ont permis d’identifier la candidature d’un jeune homme lui aussi déficient auditif qui pourrait intégrer prochainement LCM.

* Le nom de la personne a été modifié pour préserver son anonymat
** CREPI - Clubs Régionaux d'Entreprises Partenaires de l'Insertion

Le témoignage

Yvon Guénaire, RRH du site LCM de Moncel-lès-Lunéville

« Il nous faut convaincre nos responsables opérationnels pour qui le handicap est souvent perçu comme un obstacle dans la réalisation de leurs objectifs»

Nous avons, chez LCM, un très bon accord d’entreprise  sur l’emploi des personnes handicapées qui nous permet de réagir rapidement, notamment sur les cas de maintien dans l’emploi. En matière de recrutement, il nous faut travailler sans cesse pour faire connaître notre engagement à l’extérieur et surtout mobiliser nos responsables opérationnels qui n’ont encore qu’une vision lointaine des enjeux et pour qui le handicap n’est bien souvent perçu que comme un obstacle dans la réalisation de leurs objectifs. »

La fiche d'identité de l'entreprise

  • Entreprise : Logidis Comptoirs Modernes (Moncel-lès-Lunéville)
  • Groupe: Logidis Comptoirs Modernes (LCM), Groupe Carrefour
  • Activité : Commerce
  • Région : Lorraine
  • Effectifs groupe : 6 000
  • Effectifs établissement : 225
  • Effectifs TH établissement : 8
  • Unités valorisables au titre de la sous-traitance : nc
  • Contact : Yvon Guénaire (RRH)– yvon_guenaire@carrefour.com
  • Mise à jour : 25/02/2012

La fiche technique

  • Nombre de salariés concernés : 1
  • Type de handicap : déficience auditive
  • Aménagements :
    - techniques : non
    - organisationnel : non
    - formation : oui
  • Financements : LCM, Agefiph
  • Partenaires : Cap emploi, Pôle emploi, Urapeda, Crepi Lorraine, agence d’intérim
Publié le 8 juin 2012