L’Etap Hôtel de Petit-Quevilly recrute deux femmes de chambres malentendantes

L'expérience

Article rédigé le 29/11/07

Le pari d’une embauche

En 2005, Cap Emploi Rouen-Dieppe prend contact avec Béatrice et Alain Jourdain, gérants mandataires de l’Etap Hôtel de Petit-Quevilly dans le cadre d’une démarche de sensibilisation des entreprises à l’emploi des personnes handicapées. L’établissement, qui possède 75 chambres et s’appuie sur une équipe de 4 femmes de chambre, employées à mi-temps, envisage justement de recruter une cinquième personne. Cap emploi propose la candidature de Stéphanie, une jeune femme malentendante d’une vingtaine d’années. Bien qu’il appartienne au groupe Accor, qui a signé un accord d’entreprise, l’hôtel, du fait de sa petite équipe, n’est pas soumis à l’obligation d’emploi. Mais le couple, assuré de bénéficier d’un accompagnement durant la période d’intégration de la personne, décide de tenter l’expérience. « Avant de nous engager, précise Béatrice Jourdain nous avons consulté nos salariées car rien n’aurait été possible sans leur participation. Elles ont soulevé beaucoup de questions, mais elles ont accepté de jouer le jeu et nous avons convenu de faire le point au terme d’une période d’évaluation en milieu de travail. »

Pas d’intégration possible sans l’équipe

En mars 2005, Stéphanie prend son poste à l’hôtel. Il est décidé qu’elle travaillera en binôme avec une autre femme de chambre, chargée de la former mais aussi de vérifier la vacance des chambres à nettoyer avant d’y pénétrer. La jeune fille, dont c’est le premier emploi, est appareillée, mais, dans les premiers temps, elle parle très peu. Après un mois d’évaluation, elle est embauchée en CDI. « L’équipe l’a vraiment très bien accueillie et mise en confiance. En quelques semaines, elle s’est épanouie et a finalement surmonté sa peur de communiquer. Depuis, elle n’arrête pas de progresser. » En septembre 2006, l’hôtel intègre de la même manière une deuxième personne, Nadine, 49 ans, sourde profonde. Elle a plus de difficultés que Stéphanie à communiquer, mais son intégration est facilitée par l’expérience acquise au sein de l’équipe et par la présence de sa jeune collègue qui assure les traductions en langue des signes.

Une « interface de communication » pour rassurer et expliquer

« Pour les deux embauches, nous avons été parfaitement accompagnés par Cap emploi comme cela nous avait été annoncé. Dans les premiers mois, le conseiller est venu nous voir régulièrement pour s’assurer que tout se passait bien. » Une chargée de mission de l’Association régionale pour l’insertion et l’accessibilité de déficients auditifs (Ariada) intervient régulièrement pour assurer l’interface de communication. Son rôle ne se limite pas à l’interprétariat. Elle accompagne les deux salariées dans leur prise de poste, apporte des précisions sur leurs tâches, répond aux interrogations de l’employeur. Sa prestation est prise en charge par l’Agefiph.

Quand les salariées deviennent « professeurs »

L’intégration des deux femmes de chambre s’est donc déroulée sans difficulté, l’une et l’autre étant très motivées et très volontaires. Mais Béatrice Jourdain a souhaité poursuivre la démarche plus avant. « J’ai constaté que du fait de sa surdité plus marquée et de ses difficultés à s’exprimer, Nadine risquait de se sentir isolée alors qu’on sent qu’elle a envie d’échanger. J’ai donc décidé de me former à la langue des signes. » Par l’intermédiaire de la Chambre de commerce et d’industrie et grâce à un financement de l’Association de gestion du financement de la formation des chefs d’entreprise (Agefice), elle s’est inscrite à programme de formation de 90 heures au sein de l’Association de parents d’enfants déficients auditifs de Haute-Normandie (Apedahn). « Il m’a fallu un an pour obtenir le financement, mais depuis, je suis un cours d’une heure et demie tous les mercredis soir et, quand le temps nous le permet, je m’entraîne avec Stéphanie et Nadine qui sont pour ainsi dire devenue mes professeurs ! », témoigne-t-elle.

Le témoignage

Jourdain Béatrice, gérante mandataire de l’Etap Hôtel de Petit-Quevilly

« Je comprends beaucoup de choses grâce aux cours de  »

« Lorsque Cap emploi est venu nous voir, nous n’avions jamais pensé aux personnes handicapées. Le conseiller a su nous rassurer et nous convaincre, et il nous a beaucoup aidé. L’équipe de l’hôtel a été formidable. Sans son engagement, aucune intégration n’aurait été envisageable. Lorsque j’ai annoncé à Stéphanie et Nadine que j’allais apprendre la langue des signes, elles ont été ravies et elles testent régulièrement mes compétences ! Je pense que cette démarche était indispensable, professionnellement car il est important de bien se comprendre, mais aussi humainement car il est terriblement frustrant de ne pas pouvoir communiquer. Je comprends beaucoup de choses grâce aux cours. Par exemple, on s’imagine qu’il suffit d’écrire pour faire passer un message. Or, beaucoup de personnes sourdes ont un vocabulaire très restreint et de gros problèmes de lecture. On ne peut pas le deviner si on n’entre pas dans leur univers. »

La fiche d'identité de l'entreprise

• Groupe : Accor
• Entreprise : Etap Hotel Petit-Quevilly
• Activité : Hôtellerie
• Région : Normandie
• Effectif entreprise : 8
• Effectif TH de l'entreprise : 2
• Unités valorisables au titre de la sous-traitance : 0
• Accord d’entreprise : NON
• Convention Agefiph : NON
• Contact : Jourdain Béatrice (gérante mandataire) :
• Mise à jour : 20/12/2007

La fiche technique

• Durée de mise en œuvre : période d'EMT d'un mois
• Nombre de salariés concernés : 2
• Type de handicap : auditif
• Aménagements :
  • techniques : non
  • organisationnels : oui
  • de formation : oui (apprentissage de la langue des signes)
• Financements : Agefiph, Association de gestion du financement de la formation des chefs d'entreprise (Agefice)
• Partenaires : Cap emploi Rouen-Dieppe, Association régionale pour l'insertion et l'accessibilité de déficients auditifs, chambre de commerce et d'industrie, Association de parents d'enfants déficients auditifs de Haute-Normandie