Fabrix emploie deux menuisiers sourds dans son atelier de fabrication
Une dirigeante sensibilisée au handicap
Dans de nombreuses entreprises industrielles, l’idée d’embaucher des personnes sourdes et de les faire travailler en atelier
suscite encore souvent des réticences. Les mêmes arguments sont généralement avancés : difficultés de communication, risque d’accident…
Chez Fabrix, une PME familiale de 50 salariés, ces objections résistent mal à la réalité des faits. L’entreprise, spécialisée dans la conception, la fabrication et l’installation de menuiseries extérieures emploie deux salariés présentant un handicap auditif : Steve, sourd profond, qui communique exclusivement en langue de signes, et Frédéric, malentendant, qui pratique la lecture labiale. L’un et l’autre occupent pleinement leur place au sein de l’équipe et ne rencontrent aucune difficulté particulière.
Leur intégration dans l’entreprise a d’abord été le fait de la directrice générale, Elisabeth Guillaumond, dont l’histoire personnelle a permis de lever bien des freins concernant le handicap. Sa fille, aujourd’hui âgée de 26 ans, est née lourdement handicapée. « Quand on a un enfant polyhandicapé, on n’a pas d’autre choix que de s’adapter à la situation. Cela change aussi le regard que l’on peut avoir comme chef d’entreprise », explique-t-elle.
Sa fille n’ayant pas l’usage de la parole, Elisabeth Guillaumond s’est rapprochée d’institutions spécialisées comme l’Institut Régional des Jeunes Sourds de Poitiers. Elle y a appris les bases de la langue des signes et y a établi des contacts qui l’ont conduite à être régulièrement sollicitée pour des stages ou des candidatures.
Un travail autonome en atelier
C’est dans ce contexte que l’entreprise a recruté Steve, il y a près de 18 ans. « Il venait de passer un CAP de menuisier bois. On l’a formé en interne à la fabrication de nos produits, comme on le fait avec tout le monde », explique la cheffe d’entreprise.
Compte tenu de son handicap, le jeune homme est alors affecté au travail en atelier car l’intervention sur les chantiers extérieurs, souvent en co-activité avec d’autres entreprises, serait plus difficile à gérer. Par ailleurs, pour des raisons de sécurité, le travail en hauteur n’est pas recommandé. À l’atelier, le poste de travail de Steve est bien délimité. Il a sa table de montage, son outillage. Le travail étant réalisé sur plan, il est autonome dans ses tâches.
Dans le passé, l’entreprise a organisé quelques formations à la langue des signes pour l’équipe. « Cela a apporté quelques bases, mais ce n’était pas simple à organiser car c’était à l’heure du déjeuner », se souvient Elisabeth Guillaumond. Au quotidien, Steve et ses collègues ont fini par élaborer leur propre langage. L’utilisation du Smartphone a aussi beaucoup amélioré les choses.
Frédéric, lui, est arrivé dans l’entreprise il y a deux ans sur le même type de poste. Sa maîtrise de la lecture labiale lui permet de communiquer plus facilement.
Une participation active à la vie de l’entreprise
Au-delà des échanges quotidiens, la direction veille à ce que les deux salariés malentendants soient en permanence au même niveau d’information que leurs collègues et qu’ils puissent également s’exprimer. « Pour certaines choses importantes, il m’arrive d’aller les voir moi-même à l’atelier. C’est l’avantage des petites entreprises où il y a une vraie proximité entre la direction et l’équipe », précise Elisabeth Guillaumond.
Pour les entretiens professionnels ou dans certaines situations nécessitant des échanges approfondis, Fabrix fait appel à un interprète en langue des signes. Les deux salariés savent que ce recours existe et ne s’en privent pas. Il est ainsi arrivé à Steve d’être lui-même à l’initiative d’une réunion d’équipe.
« La situation de ma fille m’a obligée à sortir de ma zone de confort en tant que parent. Il n’y a pas de raison que je ne le fasse pas dans le cadre de mon entreprise », observe Elisabeth Guillaumond. Une posture qui, selon elle, est tout aussi indispensable quand il faut répondre à la demande particulière d’un client.
TÉMOIGNAGE
Elisabeth Guillaumond, directrice générale « Ce n’est pas parce qu’on entend qu’on se comprend mieux ! »
Je dis souvent à Steve et à Frédéric que ce n’est pas parce qu’on entend qu’on se comprend mieux ! Le handicap en soi n’est pas un problème. Ce qui importe, c’est que l’entreprise suive une direction claire et que les salariés y trouvent du sens. Dès l’instant où ils adhèrent, ils sont prêts à accepter la différence, quelle que soit sa forme. Évidemment, c’est à nous, dirigeant, de donner l’impulsion.
FICHE D’IDENTITÉ
Entreprise : Fabrix
Activité : industrie des biens d’équipement
Région : Nouvelle Aquitaine
Effectif entreprise : 50
Effectifs TH : 3
Unités valorisables au titre de la sous-traitance :
Contact : Elisabeth Guillaumond, directrice générale – Elisabeth.Guillaumond@fabrix.fr
Mise à jour : 19/01/2019
FICHE TECHNIQUE
Nombre de personnes handicapées concernées : 2
Type de handicap : déficience auditive
Aménagements
- techniques : non
- organisationnel : oui
- formation : non
Financements : Fabrix, Agefiph
Partenaires : associations et institutions spécialisées