Avec un seul bras valide, Cédric devient agent polyvalent dans une station service

L'expérience

Article rédigé le 30/11/07

Surcharge de travail à la station

Gérant d’une station Total à La Tour-d’Aigues, entre Aix-en-Provence et Perthuis, dans le Vaucluse, Éric Segurra lance, courant 2006, une annonce auprès de l’ANPE pour recruter un agent polyvalent en contrat d’apprentissage. S’il est aidé le week-end par trois salariés, il éprouve de plus en plus de difficultés à gérer seul la station, durant la semaine, où il officie en moyenne seize heures chaque jour, aux pompes à essence comme à la caisse.
Les parents de Cédric, 19 ans, qui comptent parmi ses clients, lui proposent de recevoir leur fils pour un entretien. Accidenté de la route, le jeune homme a perdu l’usage du bras gauche et s’est vu contraint d’abandonner le métier de paysagiste auquel il avait été formé. Éric Segurra est séduit par sa motivation et lui propose le poste. Il s’interroge cependant sur les éventuels aménagements à prévoir pour lui permettre d’accomplir ses tâches quotidiennes. À la station, on manipule de surcroît beaucoup de produits dangereux et une réflexion doit être menée en termes de sécurité.

L’accessibilité des fonctions revisitée

Afin d’éprouver lui-même les difficultés que pourrait rencontrer Cédric, Éric Segurra réalise pendant une journée tous les gestes requis par son activité avec un seul bras. Ce premier état des lieux, très empirique, aidera considérablement l’ergonome mandaté quelques temps plus tard par l’Agefiph pour procéder aux aménagements nécessaires.  
Pour pallier le handicap du jeune garçon, la porte d’entrée du magasin est entièrement automatisée afin de lui permettre d’aller et venir sans avoir à actionner la poignée s’il porte quelque chose avec le bras droit. Les extincteurs sont placés sur chariots à roulettes afin d’être plus maniables en cas d’incendie. Les différents éléments de caisse, ordinateur, clavier sont repositionnés pour en faciliter l’accès à Cédric, et les étagères, adaptées à sa prise en main. Dans le tiroir-caisse, les crochets et ressorts de pression des compartiments de billets sont remplacés par des casiers en bois, fabriqués spécialement pour permettre un rangement sur le côté et non plus à-plat. Enfin, un chariot est prévu pour achalander les rayons depuis la réserve où sont stockées les marchandises. Il est également entendu que Cédric travaillera toujours en binôme car il ne peut manipuler, par restriction médicale, des charges excédant 5 kg, telles que des bouteilles de gaz.

Aucun investissement financier pour l’employeur

L’Agefiph, contactée par Éric Segurra sur les conseils de Cap Emploi, a cofinancé les aménagements techniques. Ceux-ci ont été identifiés par le médecin du travail de secteur, un ergonome et le gérant de la station. L’étude et l’acquisition du matériel se sont étendus sur quatre à cinq mois. Pour accueillr le jeune homme dans les meilleures conditions, le gérant a suivi une formation de tuteur, financée par l’Opcareg. Quinze jours par mois, Cédric travaille à station. Son patron le forme aux différentes tâches inhérantes au poste, du service de l’essence à la vérification de la pression des pneus, des encaissements à la gestion de la station. L’autre quinzaine est consacrée aux cours, au CFA Sainte-Victoire, à Aix-en-Provence. Cédric y est en deuxième année de formation et il prépare un bac professionnel de vente.

Un regard neuf sur l’entreprise et une aide concrète au quotidien

Au terme d’un an et quatre mois d’expérience, Éric Segurra se félicite de l’embauche de Cédric, qui est selon lui aussi opérationnel que ses collègues. Motivé, ponctuel, sérieux, le jeune homme a su « démontrer aux autres qu’avec un seul bras, le boulot peut être fait » . Sa présence permet de décharger son patron de nombreuses tâches. Le jeune homme a, en outre, apporté un regard neuf sur l’entreprise. Il n’hésite pas à pointer du doigt les petits défauts à corriger pour optimiser le service aux clients. Convaincu des capacités de son apprenti, Éric Ségurra l’encourage à s’orienter vers un BTS une fois son bac professionnel en poche. Dans tous les cas, il souhaite le garder dans son équipe et souhaite, à terme, lui proposer un contrat de travail en CDI.

Le témoignage

Ségurra Éric, gérant de la station Total de La Tour-d’Aigues

« Le plus difficile, c’est le nombre des interlocuteurs »

« Lorsque Cédric a voulu s’inscrire au

 pour pouvoir commencer son apprentissage, il fallu batailler pour que l’établissement accepte de l’intégrer et surtout pour obtenir une reconnaissance de son diplôme de paysagiste afin d’accéder directement au bac professionnel. Cela n’a pas été simple. Pour un petit artisan, être confronté à plusieurs interlocuteurs et répéter les démarches maintes fois, c’est une vraie difficulté. J’aurais vraiment apprécié de n’en avoir qu’un seul. Ce qui est sûr c’est que tous les aménagements ont été faits sans peser sur les finances de l’entreprise, ça il faut le souligner. Je tiens aussi à rappeler que le médecin du travail s’est montré d’une grande disponibilité et qu’il nous a beaucoup aidés. »

La fiche d'identité de l'entreprise

• Groupe : Total
• Entreprise : station Total de La Tour-d’Aigues
• Activité : Station d'essence
• Région : Provence-Alpes-Côte-D'azur / Corse
• Effectif entreprise : 5
• Effectif TH de l'entreprise : 1
• Unités valorisables au titre de la sous-traitance : 0
• Accord d’entreprise : NON
• Convention Agefiph : NON
• Contact : Ségurra Éric (gérant) :
• Mise à jour : 02/01/2008

La fiche technique

• Durée de mise en œuvre : 4 mois
• Nombre de salariés concernés : 1
• Type de handicap : moteur
• Aménagements :
  • techniques : oui
  • organisationnels : oui
  • de formation : oui
• Financement : Agefiph
• Partenaires : médecin du travail, ANPE, ergonome, CFA Sainte-Victoire