J'ai le bon profil - Conférence tour Cayenne
En présence de Chris Combette, chanteur et guitariste, de Lima Fabien, comédienne, marionnettiste et fondatrice de l’association Je me rapproche de vous, de Paulin Félix, président du comité régional handisport de Guyane et de Stéphanie Prévot Boulard, directrice de Guyane Puissance Cours et présidente de l’APADAG.
CONFÉRENCE CAYENNE
Le 31 janvier 2019
Cette 8ème étape, est animée par Luc GERMAIN, Journaliste.
En présence de Chris Combette, chanteur et guitariste, de Lima Fabien, comédienne, marionnettiste et fondatrice de l’association Je me rapproche de vous, de Paulin Félix, président du comité régional handisport de Guyane et de Stéphanie Prévot Boulard, directrice de Guyane Puissance Cours et présidente de l’APADAG.
Emilie VENTURA, Conseillère territoriale déléguée aux personnes en situation de handicap, explique que l’intégration professionnelle est l’une des composantes majeures pour l’insertion sociale des personnes présentant un handicap.
Les enjeux de partenariat entre le FIPHFP (Fonds pour l’Insertion des Personnes Handicapées dans la Fonction Publique) et la CTG (Collectivité Territoriale de Guyane) s’inscrivent dans la démarche pilotée par le service santé handicap de la direction des ressources humaines ; non seulement vers une mise en conformité intégrale avec la règlementation mais aussi une valorisation réelle et visible des travailleurs handicapés recrutés par la CTG.
A la date du 1er janvier 2017, sur un effectif de 2 322 agents en activité, 90 sont déclarés en situation de handicap. Cela représente un taux de 3.86 % : encore un peu loin du seuil de 6% prescrit par la loi du 10 juillet 1987.
Néanmoins les orientations prises par la CTG pour réaliser, à terme, une inclusion sociale intégrale sont clairement affichées et reposent sur une formalisation des objectifs et des évaluations associant le FIPHFP, les acteurs professionnels et institutionnels du handicap, de l’insertion sociale et de l’emploi. Le tout dans le but d’un épanouissement sociale des travailleurs handicapés avec une mobilisation concernée.
Lima Fabien, fondatrice de l’association Je me rapproche de vous, créée en 2016, artiste et comédienne, travaille avec l’humain en proposant des messages et projets et les fait entendre de manière artistique.
Elle travaille également avec la langue des signes. Le projet « Marionnettes des signes » a été primé en 2016 par le prix Réalise. Ce projet a été monté avec des enfants en classe Ulis (Unités Localisées pour l’Inclusion Scolaire) pour monter un spectacle de marionnettes qui s’exprime via la langue des signes et non via la parole.
Il y a une réelle volonté de travailler avec des enfants sourds pour donner de l’espoir ; créer comme tous les enfants font et ce que chacun fait dans son travail au quotidien.
En tant qu’artiste, elle a été amenée à travailler avec différentes classes et dans tous les projets elle a toujours inclus un clin d’œil à la langue des signes. Cela a provoqué, chez certains professeurs, l’envie de continuer dans ce sens et d’accès leur travail sur la langue des signes.
Stéphanie Prévot Boulard, présidente de l’APADAG (Association des Parents et Amis des Déficients Auditifs de Guyane) existante depuis 28 ans, nous fait part de la nécessité d’évolution de cette association ; c’est un projet lourd à porter car il demande beaucoup de financements. Il a donc une réelle volonté que ce projet soit plus entendu.
De manière globale, les projets de vie des personnes en situation de handicap doivent changer. Nous ne pouvons pas continuer, à l’heure de notre évolution sociétale, à considérer que la personne en situation de handicap est quelqu’un d’autre. Le fait que l’inclusion n’ai pas été faite de manière systématique entraîne la situation actuelle où nous sommes encore au stade de se poser des questions sur ce sujet. Nous ajoutons à cela une méconnaissance totale qui ne permet pas de proposer des projets de vie plus grand.
On peut tout de même dire qu’au niveau de l’école et de l’éducation nationale il y a un suivi de manière régulière. Un suivi qui va être amélioré et dans une démarche où les personnes auront moins « peur » de la différence.
Chaque handicap à sa difficulté, et c’est pour cela que nous devons apprendre à les connaître pour mieux s’y adapter.
David Noel, Conseiller Technique Académique pour la scolarisation des élèves en situation de handicap ajoute qu’il ne serait cependant pas spécifiquement nécessaire d’apprendre à l’ensemble de la population la langue des signes. Cela représenterait en effet un nombre d’heures très importants d’apprentissage. De plus, il existe plusieurs langues de signes ; cela impliquerait d’en apprendre qu’une seule sans pouvoir, in fine communiquer avec l’ensemble des personnes présentant un trouble auditif.
Les enfants en situation de troubles auditifs représentent environ 5% des personnes en situation de handicap.
En Guyane, un pôle d’accueil des enfants sourds a été mis en place en 2005 afin de leur permettre de bénéficier d’enseignants qui signent. L’intérêt est de pouvoir suivre les enfants jusqu’au BAC à travers une Ulis qui accueille les enfants au collège et au lycée. Malheureusement, il y a des difficultés de recrutement des personnes et les crédits ne sont pas toujours reconduits.
Dans les sites identifiés comme accueillant des enfants avec troubles auditifs, il serait ici intéressant d’enseigner cette langue à l’ensemble des enfants de ces établissements afin de favoriser la communication immédiate.
Donc, au final, ne pas apprendre cette langue à tous les élèves de France mais seulement sur des sites ciblés où les élèves le souhaitent et pourront ainsi communiquer avec les personnes sourdes de leur entourage.
Suite à cette intervention, Stéphanie Prévot Boulard reprend la parole. Elle ne peut pas entendre que parce que les personnes avec une déficience auditive représentent 5%, ne peuvent pas être entendu et qu’il va être compliqué de mettre en place des moyens, des structures, … Cependant, elle le comprend car elle connaît très bien la question financière et des ressources nécessaires.
Le travail ne fait que commencer et aujourd’hui nous sommes dans une situation d’urgence ; nous n’avons pas adapté la société aux personnes en situation de handicap. Nous ne pouvons donc pas régler cette problématique immédiatement mais sur le long terme. Pour ainsi arriver à une société plus inclusive, il est nécessaire d’intégrer les ressources financières nécessaires.
Paulin Felix, Président du comité régional handisport, vice-président de l’APROSEP, Président de Cœur Handicap et accordeurs de piano de profession, insiste sur la nécessité d’intervenir dans le cadre de l’employabilité des personnes en situation de handicap.
Il a perdu la vue à l’âge de 20 ans, et de ce fait a dû apprendre les différents types de braille. Aujourd’hui accordeur de piano, il déclare qu’être handicapé dans ce métier est une véritable valeur ajoutée.
C’est une fois rentré en Guyane, qu’il a été confronté à la réalité du monde de l’entreprise et du monde du travail.
En Guyane, à peine 500 personnes en situation de handicap travaillent. La plupart d’entre elles ne sont pas épanouies professionnellement. Les personnes handicapées doivent d’autant plus prouver leur légitimité à travailler : plus de qualifications, travailler plus longtemps que les autres salariés, … Elles doivent même parfois se justifier d’être handicapées, car moins le handicap est visible moins on y croit.
L’Etat nous a donné les moyens pour normalement sortir de là où les personnes en difficultés sont. Malheureusement, la plupart des personnes ne sont pas au courant des moyens qui sont présents. Alors la question se pose, est-ce qu’il ne faudrait pas, un moment donné, avoir une grosse campagne de communication permettant la connaissance de ces dispositifs ? Pour donner un exemple de communication qui a fonctionné : la fondation des aveugles à récupérer le plus grand nombre de dons grâce à la mise en œuvre de gros moyens.
On ne doit pas convaincre les personnes qui sont déjà acteurs auprès des personnes en situation de handicap, ce sont les autres que nous devons « convaincre » avec une communication de masse.
Pour donner des exemples de moyens mis en place mais peu connus : Le FIPHFP prend en charge les déplacements à 100% ; depuis la loi de 2005 une prise en charge des personnes handicapées pour les accompagner à une pratique sportive jusqu’à hauteur de 1 500 euros par mois, et bien d’autres encore.
Il faut avoir conscience que nous sommes tous concernés, être handicapé peut arriver à n’importe qui et à n’importe quel moment de sa vie. Nous avons donc tous à y gagner, et surtout de la richesse !
Aujourd’hui, nous sommes tous conscients qu’il y a du potentiel et c’est donc le moment de se mettre en orbite. Mais le manque d’informations se fait encore une fois ressentir. Il y a un certain nombre d’acteurs, pas toujours spécialistes, qui rentrent en jeu et cela provoque ainsi des failles. Certains acteurs bloquent certains dossiers car ils ne sont pas au courant des dispositifs. Nous retrouvons également ces failles dans la société elle-même.
Stéphanie Prévot Boulard rebondit sur ce récit en expliquant que les dossiers à monter sont faits par des bénévoles qui ne sont pas des experts. Dans les gestions des dossiers il y a donc des blocages. Nous avons besoin d’aller au-delà de la réglementation, et cela dépend de la personne qui traite : faire un effort d’aide pour corriger un dossier non complet ou autre.
Chacun doit être spontané. Et que la peur soit retenue.
Il est important de comprendre que nous avons besoin que la société réagisse différemment. On ne veut pas que l’on fasse les choses juste parce qu’une personne proche est handicapée ; nous souhaitons que cela touche tout le monde.
Nous ne pouvons pas accepter que les personnes handicapées comptent moins et soient défavorisées, sous prétexte de leur minorité. Nous avons aujourd’hui assez évolué pour comprendre que la différence se fait à plusieurs niveaux, elle doit être prioritaire dès lors qu’elle est naturelle. Cela doit changer dans les approches.
Dans les budgets, la question du handicap est systématiquement abordée et prévue, mais ce n’est pas l’affaire d’une personne. On a aujourd’hui énormément de choses à gérer car justement cela n’a pas été géré depuis le début. Il est important de rappeler qu’une société inclusive doit inclure tous les types de personnes. Cela se traduit par l’adaptation des budgets, en prenant en compte les différences entre les handicaps et donc s’adapter à chacune d’elles.
Chris Combette, chanteur et guitariste, est ému par les témoignages entendus. Il nous rappelle, à tous, que les personnes handicapées font partie de la société, donc fatalement elles sont la société.
Pour agir et faire bouger les choses, il faut arrêter de croire qu’il suffit d’en parler !
Il est persuadé que l’éducation est la clé. En effet, étant professeur, il parle tous les jours à des enfants et essaye de leur enseigner les mathématiques pour leur inculquer des valeurs. Agir de façon concrète, c’est faire valoir la loi ; lorsque nous ne la respectons pas (construire un immeuble sans accès aux personnes handicapées, par exemple) nous payons alors une amende, ça permet d’éduquer.
Il faut donc commencer par transmettre aux enfants le fait qu’il y a, au sein de la société, des personnes qui ont des difficultés physiques ou psychiques mais qu’elles sont comme nous. Elles doivent donc être considérées en tant que telle et apportant une véritable valeur ajoutée.
Alexis Turpin, délégué régional de l’Agefiph Antilles-Guyane, a conclu cette conférence avec des éléments de contexte propre au territoire et en dressant un bilan du travail réalisé par les équipes de l’Agefiph et des prestataires avec qui elle collabore au quotidien.
Il y a un certain nombre de services et prestations que l’Agefiph finance. Il y a des experts, des spécialistes de certains types de handicap qui interviennent en essayant de couvrir l’ensemble des parcours (emploi, formation, …). Des professionnels qui sont présents en Guyane et qui peuvent venir en appui, faciliter, dans les différentes situations rencontrées par les personnes handicapées.